L’inconstitutionnalité du contrôle des mesures d’isolement et de contention

Suite à la décision du Conseil Constitutionnel de juin 2020 de déclarer non conforme à la Constitution les dispositions relatives à l’isolement et à la contention, Paul Véron nous partage le commentaire qu’il a rédigé pour La Semaine Juridique, avec Eric Péchillon.

L’exigence d’un contrôle juridictionnel des mesures d’isolement et de contention. Le Conseil constitutionnel s’est prononcé, le 19 juin 2020, affirmant que si « l’article 66 de la Constitution exige que toute privation de liberté soit placée sous le contrôle de l’autorité judiciaire, il n’impose pas que cette dernière soit saisie préalablement à toute mesure de privation de liberté […]. En revanche, la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible. Or, si le législateur a prévu que le recours à isolement et à la contention ne peut être décidé par un psychiatre que pour une durée limitée, il n’a pas fixé cette limite ni prévu les conditions dans lesquelles au-delà d’une certaine durée, le maintien de ces mesures est soumis au contrôle du juge judiciaire. Il s’ensuit qu’aucune disposition législative ne soumet le maintien à l’isolement ou sous contention à une juridiction judiciaire dans des conditions répondant aux exigences de l’article 66 de la Constitution ». L’article L. 3222-5-1 du Code de la santé publique est dès lors déclaré inconstitutionnel. Son abrogation est toutefois différée au 31 décembre 2020. Il appartient désormais au législateur de consolider le régime des décisions de mise à l’isolement et de contention en exigeant un contrôle juridictionnel systématique lorsque ces mesures sont prolongées au-delà d’une certaine durée. Une série d’interrogations en découlent, présentée dans La Semaine juridique par Paul Véron et Eric Péchillon.

L’affaire Lambert et la CIDPH

Le cas de Vincent Lambert a suscité un très vif débat et de nombreuses décisions judiciaires. A la suite de la décision de la cour de cassation d’autoriser l’arrêt des traitements le 28 juin dernier, et du décès de Vincent Lambert quelques jours après, Paul Véron et Marie Baudel reviennent sur cette affaire qui met en perspective la place de la Convention Internationale des Droits des Personnes Handicapées dans le système judiciaire français. 

Les faits. Sans être exhaustif, il convient de rappeler la chronologie des faits. Vincent Lambert a été victime d’un grave accident de la circulation, survenu en 2008 et l’ayant plongé dans le coma. Pris en charge au centre hospitalier universitaire de Reims, il ne bénéficie d’aucun traitement curatif mais est maintenu sous suppléances vitales, en l’espèce, une nutrition et une hydratation artificielles (techniques qui constituent bien des « traitements susceptibles d’être arrêtés » lorsqu’ils traduisent une obstination déraisonnable : CSP, art. L. 1110-5-1 al. 2). Une décision d’arrêt des suppléances vitales est prise par le chef du service de soins palliatifs, le docteur Kariger, estimant que leur poursuite serait constitutive d’une obstination déraisonnable au sens de la loi (CSP, art. L. 1110-5-1 al. 1er). Cette décision est jugée légale tant par le Conseil d’Etat (CE, ord. 24 juin 2014, n° 375081), que par le Cour européenne des droits de l’homme (CEDH, gde ch., 5 juin 2015, n° 46043/14, Lambert c/ France, D. 2015. 1212 ;), saisis par les parents du patient, opposés à l’arrêt des traitements. Le contexte conflictuel qui entoure la prise en charge de Vincent Lambert, notamment en raison de l’opposition virulente d’une partie de la famille, contribue toutefois à la démission du docteur Kariger, dont la décision demeure alors inexécutée. Lire la suite

Le Conseil d’Etat refuse de contrôler la légalité d’une instruction ministérielle relative aux mesures d’isolement et de contention

Commentaire par Paul Véron de la décision du Conseil d’État 12 juillet 2018 n° 412639

Le CRPA a exercé un recours en annulation contre l’instruction ministérielle du 29 mars 2017 relative à la politique de réduction des pratiques d’isolement et de contention au sein des établissements de santé autorisés en psychiatrie. Cette demande a été rejetée par le Conseil d’Etat dans une décision du 12 juillet 2018. Lire la suite